PS : le troisième tour du congrès de Marseille se dispute en Ariège

Les deux « gauches irréconciliables » théorisées par Manuel Vals ont rendez-vous pour un nouveau duel le 26 mars en Ariège. Avec les électeurs d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen pour arbitres.

C’est à la demande du candidat du Rassemblement National que le Conseil Constitutionnel a invalidé l’élection de Bénédicte Taurine (LFI). Ecarté du deuxième tour pour seulement 8 voix de retard sur la candidate de la majorité présidentielle en juin 2022, Jean-Marc Garnier avait déposé un recours après la découverte dans l’urne de Tarascon-sur-Ariège de 136 bulletins au nom de la candidate du RN de l’autre circonscription du département, invalidés lors du dépouillement. Pour le PS de l’Ariège, c’est une deuxième chance un peu inespérée de prendre sa revanche contre les Insoumis et la NUPES.

Martine Froger, 61 ans, suppléante de l’unique sénateur (PS) de l’Ariège, repart à l’assaut contre la député sortante en se présentant comme une opposante à Emmanuel Macron plus crédible que « l’extrême-droite et l’extrême-gauche ». Distancée de 600 voix au printemps dernier, la candidate a été suspendue du parti comme Laurent Panifous, qui a déjà repris l’autre siège de député de l’Ariège à LFI. La réintégration de tous les « dissidents » opposés à l’accord électoral passé nationalement entre Olivier Faure et Jean-Luc Mélenchon est l’une des pommes de discorde entre partisans et opposants au premier secrétaire du PS, qui se sont violemment affrontés lors du congrès de Marseille. Sur ses tracts verts et rouges qui ont remplacé le poing et la rose, l’insoumise à LFI s’affiche en photo avec Carole Delga, présidente de la région Occitanie, et la présidente (PS) du département, Christine Téqui, farouches opposantes à la NUPES. Elue municipal d’Alzen (182 électeurs) qui avait massivement voté comme d’autres « villages rouges » du haut Couserans pour Mélenchon au premier tour de l’élection présidentielle, Martine Froger bénéficie aussi de nouveaux soutiens nationaux depuis le dernier congrès du PS. Plébiscité par 90% des derniers militants socialistes de la fédération de l’Ariège, le maire de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol fait campagne en faveur de la dissidente du Couserans dès qu’on lui tend un micro. Anne Hidalgo a elle aussi témoigné de son soutien sur France Info. « Il n’y a pas de républiques autonomes de l’Ariège ou de l’Occitanie », réplique un lieutenant d’Olivier Faure dans Le Monde.

Bénédicte Taurine, 46 ans, peut elle aussi compter sur des renforts nationaux. Trois députés LFI-NUPES sont déjà venus sur le terrain pour soutenir leur ancienne collègue invalidée, le 22 février dernier. L’ancienne prof de SVT, issue des rangs du PCF, compte surtout sur la mobilisation contre la réforme des retraites pour retrouver l’élan populaire qui lui avait permis d’être ré-élue dans le sillage de l’élection présidentielle. Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l’Assemblée Nationale, sera la tête d’affiche d’un meeting sur le sujet qui réunira toutes les composantes de la NUPES ce vendredi à Lavelanet. Le PS sera représenté par Lucien Beaumel, un ancien député frondeur de Touraine qui sert de courroie de transmission avec les syndicats.

A Foix, la préfecture doit tirer au sort l’ordre des panneaux électoraux après la clôture des inscriptions des candidats. A priori, on se bouscule moins qu’au printemps dernier, quand dix formations politiques s’étaient engagées dans la course. Le parti d’Emmanuel Macron a reconduit le duo de conseillers municipaux d’opposition de Foix qui avaient recueilli 44% des suffrages exprimés au deuxième tour. Le RN, qui rêve lui aussi de revanche, a sagement attendu la fin des vacances scolaires pour lancer sa campagne. Louis Aliot, maire de Perpignan, vient samedi le département qui a vu ses débuts en politique et sur les terrains de rugby, pour tenter de qualifier le candidat de son parti pour la finale du 2 avril.

Un ancien cacique du PS national et local pronostique une faible participation de l’ordre de 30% des 57.000 électeurs de la circonscription. Dans les urnes des 213 bureaux de vote, l’abstention risque d’être inversement proportionnelle à l’intérêt médiatique national pour cette élection partielle en guise de match-retour.

version longue d’un article pour Libération

Occitanie : diviser pour mieux Reynié

Qui se souvient de Dominique Reynié, « politologue » médiatique qui délaissa provisoirement les studios de télé pour tenter d’offrir la présidence de la région Occitanie sur un plateau à la droite supposée unie de Nicolas Sakozy ? Jugé trop « mou », le centriste aveyronnais fut mis KO d’emblée par une partie de son camp qui lui renvoya une « bonne droite ». L’histoire va-t-elle se répéter en 2021… si le scrutin, repoussé en juin sur les conseils de Jean-Louis Debré, n’est pas une nouvelle fois renvoyé ?

On ne se bouscule pas chez Les Républicains pour monter sur le ring face à l’extrême-droite. Le nom du flamboyant député lotois Aurélien Pradié est avancé, mais le maire de Beaucaire Julien Sanchez n’en ferait qu’une bouchée, selon un sondage Ifop réalisé en septembre dernier (25% contre 14%). L’Ifop vient donc de tester la candidature de l’obscur député aveyronnais Arnaud Viala… dont le score frôle dangereusement l’élimination dès le premier tour (11%). Selon ce sondage réalisé pour Sud Radio, la seule solution serait d’envoyer au front Brigitte Barèges, la très sarkozyste maire de Montauban. Alliée à Robert Ménard au sein d’une « liste d’intérêt régional » (sic), l’ancienne tête de liste de la droite en Midi-Pyrénées face à Martin Malvy obtiendrait un meilleur score (14%) que le candidat officiel de la droite. Une prime à la dissidence qui valide au passage la stratégie du maire de Béziers, plaidant inlassablement pour un « rassemblement des droites » en siphonnant la carpe républicaine et le lapin nationaliste. Les derniers auditeurs en gilet jaune de l’ex-radio sudiste qui applaudissent les accents populistes du nouveau boss de ls station, l’ultra-Trumpien Didier Maïsto, ont pu se pâmer à la perspective d’un tel « pou-putsch » !

Brigitte Barèges, qui sait parfaitement détourner les voix de l’extrême-droite à son profit par quelques saillies bien choisies, a toutefois un léger handicap pour suivre la voie de son homologue de Béziers : l’élue de Montauban est sous la menace d’une peine d’inéligibiiIté de 5 ans pour avoir employé un scribouillard chargé de chanter ses louanges dans des feuilles de choux locales. Le verdict du tribunal de Toulouse sera connu le 9 février. Brigitte Barèges, qui s’était pourtant ostensiblement affichée avec Ménard à Montauban en octobre, fait semblant de ne pas être au courant de ce qui se trame en coulisses. Au détour d’un long et inattendu entretien confié à La Dépêche du Midi – qui la flingue pourtant à longueur de colonnes – elle assure même vouloir plutôt se présenter aux élections départementales dans le Tarn-et-Garonne.

Au Rassemblement National, personne n’est dupe. Inquiet de la manœuvre orchestrée par Ménard, le parti de Marine Le Pen envisage lui aussi de changer de cheval. Exit le petit taureau gardois Sanchez, conseiller régional sortant. Sur les conseils avisés de Louis Aliot, qui joue désormais les « notables » à Perpignan, l’extrême-droite mise désormais sur l‘ancien juge Jean-Paul Garraud, venu des rangs de l’UMP. Ce farouche concurrent d’Alain Juppé à Bordeaux avait jadis fondé « la Droite Populaire » avec Alain Mariani, ancien ministre de François Fillon et Nicolas Sarkozy,…et une certaine Brigitte Barèges. Une liste dissidente à droite risque en effet d’affaiblir le score du RN au premier tour, qui passerait de 25% à 16% selon l’Ifop. Cédant au passage la première place à Carole Delga (25%).

Les stratèges socialistes de la présidente sortante peuvent sortir le champagne… et ressortir la petite blague blindée de Staline au Vatican : la droite, combien de divisions ?

Oui au Pays catalan, ou non à l’Occitanie ?

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Les Catalans défilent contre Madrid au sud, contre Toulouse au nord

L’Occitanie a réveillé les vieux démons autonomistes catalans à Perpignan. Près de 10.000 personnes ont manifesté samedi dans la préfecture des Pyrénées-Orientales pour réclamer la reconnaissance du « pays catalan ». Les manifestants dénoncent « une annexion » depuis le vote du nouveau nom de la région, issue de la fusion du Languedoc-Roussillon avec Midi-Pyrénées. Le ressentiment contre Carole Delga, présidente (PS) du nouveau conseil régional, semble encore plus puissant que contre le projet avorté de « Septimanie » de Georges Frêche en 2005. A l’époque, 5.000 personnes étaient descendues dans la rue, contraignant le turbulent maire socialiste de Montpellier, qui venait de s’emparer de la région, à jeter son éponge latiniste face à la bronca populaire.

Ce nouvel abcès de fièvre catalane est pourtant sans aucune commune mesure avec la situation de l’autre coté de la frontière. A Barcelone, même la bourgeoisie commerçante, traditionnellement centriste et catholique, est entrée en guerre ouverte contre Madrid depuis la crise économique et financière de 2008. Les autonomistes catalans du sud, jusqu’alors satisfaits des pouvoirs concédés à leur puissante région, réclament désormais l’indépendance. Des centaines de milliers de personnes sont une nouvelle fois attendues dans les rues des principales villes de la région en ce dimanche de « Diada », la « fête nationale » catalane.

La manifestation de samedi à Perpignan était davantage dirigée contre Toulouse que contre Paris ou pour Barcelone. Les catalanistes les plus enragés se demandent pourquoi Manuel Valls, né à Barcelone et qui parle la même langue qu’eux, n’a pas déjà censuré la présidente socialiste d’Occitanie. Ils annoncent vouloir déposer un recours devant le Conseil d’Etat si les magistrats de la plus haute juridiction française valident officiellement le nouveau nom de la région. On voit mal, toutefois, des conseillers d’Etat déjuger leurs collègues, dans l’hypothèse ou le nom « Occitanie » serait validé. La décision des juges est attendue le 1er octobre, au plus tard.

le ciment du nom

L’agitation catalane apparaît, coté français, comme un jeu de poker-menteur. De droite comme de gauche, les plus jacobins des élus sont descendus dans la rue en se découvrant subitement « catalans ». Même le représentant de Debout la France, le parti de Nicolas Dupont-Aignan, appelait à manifester contre Carole Delga et l’hégémonie supposée des « Occitans ». Quelques militants occitanistes, pourtant alliés avec le PS lors de la campagne des élections régionales, étaient également dans le cortège, par solidarité avec leurs cousins « régionalistes ». Le « non » au nouveau nom de la région sert de ciment à une opposition profondément divisée.

Indépendantistes, autonomistes, départementalistes ou régionalistes : on trouve de tout dans les nouvelles galeries catalanes ! La présidente (PS) des Pyrénées-Orientales figurait ainsi dans les rangs des opposants à son homologue socialiste de la région, au même titre que le maire (LR) de Perpignan. Les deux élus, qui se disputent le leadership de la contestation, ont cependant défilé séparément. Emeline Malherbe, qui a succédé à Christian Bourquin à la tête du conseil général quand ce dernier a remplacé Georges Frêche à Montpellier, redoute avant tout la disparition du département. Président de la communauté d’agglomération Perpignan Méditerranée, Jean-Marc Pujol imagine au contraire de réunir la plupart des 226 communes du département dans l’orbite de son agglomération.

Les divisons entre élus locaux sont tellement nombreuses que le scénario d’un regroupement de toutes les communes au sein d’un « pays catalan », inspiré de l’exemple en cours au Pays Basque français, apparaît inaccessible. Brice Lafontaine, adjoint du maire de Perpignan aux affaires catalanes, préfère prendre exemple sur la Corse. A la tête d’une petite formation autonomiste (Unitat catalana) à l’origine de la manifestation de samedi, le jeune homme réclame la création d’une nouvelle région pour les Catalans. Des musiciens locaux également fait un tabac cet été en réclamant un « Occexit » sur YouTube. Seul le FN a brillé par son absence. Louis Aliot, qui brigue la mairie de Perpignan après avoir échoué à s’emparer de la région, s’est abstenu de tout commentaire dans la surenchère identitaire que se livrent le PS et la droite locale.